Déguerpissements abusifs : Oligui le bourreau veut enquêter sur lui même

Qu'un chef d'État annonce une enquête sur les conséquences de ses propres décisions constitue déjà un aveu d'incompétence flagrant.
MBIGOU—Le Gabon vient d'assister à l'un des spectacles les plus cyniques de son histoire récente. Brice Clotaire Oligui Nguema, le général devenu président par la force des armes, ose aujourd'hui annoncer une « enquête » sur les conséquences des expulsions massives et des démolitions de maisons dans le quartier de Plaine Orety à Libreville. Cette mascarade révèle toute l'étendue de son hypocrisie et de son mépris pour les citoyens gabonais les plus vulnérables.
L'aveu d'une improvisation criminelle
Qu'un chef d'État annonce une enquête sur les conséquences de ses propres décisions constitue déjà un aveu d'incompétence flagrant. Cette démarche révèle de manière éclatante qu'aucun travail préparatoire n'a été effectué pour comprendre l'ampleur des dégâts causés aux centaines, voire aux milliers de familles impactées.
Comment peut-on ordonner la destruction des foyers de citoyens sans avoir au préalable évalué les répercussions humaines, sociales et économiques d'un tel acte ? Cette « enquête » tardive n'est rien d'autre que la reconnaissance tacite d'une gestion hasardeuse et irresponsable. Elle démontre que les autorités ont agi avec une légèreté criminelle, traitant les habitants de Plaine Orety comme des pions sur un échiquier politique.
Oligui, un agent des ténèbres
Depuis le temps du CTRI, les Gabonais étaient habitués aux annonces nocturnes. C'est aussi dans la nuit noire qu'Oligui avait choisi de faire exfiltrer Ali Bongo et sa famille du Gabon vers l'Angola. Plus révélateur encore : Oligui Nguema a choisi de se rendre sur les lieux de cette tragédie humanitaire en pleine nuit, comme un voleur qui craint d'être vu en plein jour. Cette visite furtive trahit sa conscience coupable et son désir d'éviter la honte et le stigmate qui accompagnent inévitablement cette démarche hypocrite.
Un dirigeant responsable assume ses décisions au grand jour, face aux cameras et devant ses concitoyens. En choisissant les ténèbres pour cette visite de « compassion », Oligui Nguema révèle sa lâcheté et son incapacité à assumer les conséquences de ses actes. Cette fuite dans l'obscurité est le comportement d'un homme qui sait pertinemment avoir causé un tort irréparable à son peuple.
Un écran de fumée institutionnel
Mais le summum de cette comédie grotesque réside dans la structure même de cette prétendue enquête. Oligui Nguema cumule aujourd'hui les fonctions de chef de l'État et de chef du gouvernement, tout en s'appuyant sur un parlement de transition dont chaque membre a été personnellement nommé par ses soins. Dans ces conditions, qui peut croire sérieusement qu'une quelconque forme de responsabilité émergera de cette mascarade ?
Cette concentration des pouvoirs entre les mains d'un seul homme transforme toute enquête en simulacre. Comment Oligui pourrait-il se déclarer coupable de maladministration ? Comment pourrait-il reconnaître avoir orchestré un vol massif des terres des pauvres pour les redistribuer à ses riches donateurs ? L'absence totale de contre-pouvoirs garantit l'impunité et fait de cette enquête un enterrement prémédité de la justice.
Les expulsions de Plaine Orety révèlent la vraie nature du régime d'Oligui Nguema : un système où les puissants s'enrichissent sur le dos des plus démunis, où la force prime sur le droit, où l'arbitraire remplace la justice. Ces familles chassées de leurs foyers ne sont que les victimes collatérales d'un système prédateur qui privatise les profits et socialise la souffrance.
Cette affaire illustre parfaitement la continuité entre l'ancien régime et le nouveau : même méthodes, mêmes victimes, même impunité. Seuls les visages changent ; la prédation reste.
Or, le Gabon mérite mieux que cette mascarade. Les victimes de Plaine Orety méritent une vraie justice, pas cette parodie orchestrée par celui-là même qui a ordonné leur malheur. Tant que le bourreau jouera à l'enquêteur, la justice restera un mirage dans le désert de l'autoritarisme gabonais.