Le CTRI a-t-il détourné les salaires du staff de l'Assemblée?

Le CTRI a-t-il détourné les salaires du staff de l'Assemblée?
Le président non élu de l'Assemblée nationale de la transition, J.F. Ndongou (à g.), avec le chef de la junte non élu, Oligui Nguema, et la présidente du Sénat non élue, Paulette Missambo.

La frustration des employés du palais Léon Mba est le symptôme d’un malaise bien plus profond. Jean-François Ndongou, ex-baron du PDG, doit être limogé.

MÉDOUNEU – Il est difficile de rester indifférent face aux récents événements à l'Assemblée nationale de la Transition au Gabon. D’après une dépêche de l'Agence Gabonaise de Presse (AGP), les employés de cette institution ont décidé de suspendre leurs activités, exaspérés par les retards récurrents dans le paiement de leurs salaires déjà dérisoires.

Selon l'AGP, certains travailleurs ne touchent que 200 000 francs CFA par mois – une somme qui, comparée aux salaires des députés, semble être une erreur d'arrondi. Comment peut-on justifier une telle inégalité alors que ces fonctionnaires peinent à joindre les deux bouts ? Leur travail est essentiel pour le bon fonctionnement de cette institution, et pourtant, ils sont laissés pour compte.

Pédégiste un jour, pédégiste à vie

Ce n’est malheureusement pas une surprise. L'Assemblée nationale de la Transition au Gabon est dirigée par Jean-François Ndongou, un ancien pilier de l'ex-parti au pouvoir, le PDG, celui-là même qui a été déposé par la junte du CTRI il y a un an.

Ce retour aux affaires de figures emblématiques de l’ancien régime laisse perplexe plus d'un Gabonais. D'autant plus que chacun des députés a été nommé par le général-président.

Le général de brigade Brice Clotaire Oligui Nguema, chef de la junte, pensait peut-être naïvement qu'il serait possible d’enseigner de nouvelles pratiques à ceux qui, pendant des décennies, ont perpétué la mauvaise gestion et la corruption au Gabon. Mais peut-on vraiment apprendre de nouveaux tours à un vieux singe ?

Le PDG, parti au pouvoir avant le coup d'État, excellait dans l’art du détournement de fonds publics, et il serait illusoire de penser que ceux qui en étaient les architectes pourraient, du jour au lendemain, se convertir en gardiens de la bonne gouvernance. La transition promettait un nouveau départ pour le Gabon, mais force est de constater que les mêmes pratiques persistent, ancrées dans un système profondément vicié.

Cela nous rappelle tristement un vieil adage : plus ça change, plus c'est la même chose. Au Gabon, comme dans tant d'autres pays mal gouvernés, les promesses de renouveau s’écrasent souvent contre le mur des réalités politiques.

Oligui doit se réveiller

Brice Clotaire Oligui Nguema, en tant que leader de la transition et homme fort du Gabon post-coup d’État, se trouve dans une position complexe mais cruciale pour rétablir la confiance et engager des réformes durables. Si son intention est vraiment de rompre avec les pratiques du passé et d'insuffler un nouvel élan au pays, il doit limoger les figures qui incarnent la corruption et les remplacer par des Gabonais aux compétences avérées et au parcours intègre. 

La frustration des employés du palais Léon Mba est le symptôme d’un malaise bien plus profond. Oligui Nguema doit engager un dialogue franc et ouvert avec eux et avec d'autres segments de la société pour comprendre leurs préoccupations et travailler ensemble à des solutions. Ignorer ces voix ne ferait qu’aggraver la situation sociale et politique. Il pourrait aussi envisager la mise en place d’une instance de conciliation pour résoudre les conflits salariaux et institutionnels.

La lutte pour un avenir meilleur ne fait que commencer, mais tant que les anciens mécanismes restent en place, le véritable changement sera hors de portée.