Le CTRI, entreprise informelle ou société écran ?

Le CTRI, entreprise informelle ou société écran ?
Le général Oligui Nguema, chef de la junte, à bord d'un camion portant le logo du CTRI, août 2024 (capture d'écran).

Le CTRI n'est pas une personne morale en vertu du droit et des lois en vigueur au Gabon. Lui attribuer des biens de l'Etat est une forme de détournement de fonds.

MITZIC — Le Gabon traverse une période sombre de son histoire, accentuée par la prise de pouvoir de la junte militaire dirigée par le général de brigade Brice Clotaire Oligui Nguema, entouré d'autres amateurs en treillis.

Cette junte, opérant sous le nom du Comité pour la Transition et la Restauration des Institutions (CTRI), semble déterminée à gouverner le pays en dehors de tout cadre légal reconnu. Il est impératif de rappeler que le CTRI, tel qu'il est actuellement structuré, n'est pas une entité juridiquement autorisée en vertu du droit gabonais.

Le CTRI n’est ni une personne physique, ni une personne morale reconnue

En droit gabonais, la notion de personnalité juridique est clairement définie. Une personne physique est un être humain doté de droits et d'obligations. Une personne morale, quant à elle, est une entité abstraite, telle qu'une société ou une association, créée et reconnue par la loi, et à laquelle est conférée la personnalité juridique. Cela signifie qu'elle peut ester en justice, conclure des contrats, et posséder des biens.

Or, le CTRI n'est ni une personne physique, ni une personne morale reconnue par le cadre juridique gabonais. Cette structure n'a jamais été légalement enregistrée, et ne dispose donc pas de la capacité juridique nécessaire pour exercer des fonctions officielles ou administratives au nom de l'État gabonais. En conséquence, toutes les décisions prises par cette entité sont entachées d'illégalité.

La Charte de Transition ne mentionne pas le CTRI comme organe officiel

La Charte de Transition, adoptée par les autorités militaires, énumère explicitement dans son article 34 les organes officiels de la transition. Pourtant, nulle part dans ce document n'apparaît le CTRI. Cela signifie que cette entité fonctionne en dehors du cadre institutionnel prévu, sans reconnaissance officielle ni légitimité constitutionnelle.

Le fait qu'une organisation aussi cruciale que le CTRI opère en dehors des structures légales soulève des questions graves quant aux véritables intentions de ses promoteurs.

En l'absence de toute base légale, le CTRI pourrait être perçu comme une entité informelle, ou pire encore, comme un société ecran et donc une coquille vide destinée à masquer des activités douteuses.

Le CTRI, nouveau Delta Synergie ?

En fait si on creuse bien, on conclut que les activités du CTRI peuvent être qualifiées de détournement de fonds publics. Le détournement est défini comme le fait de réorienter des ressources publiques de leur destination légale vers des fins non autorisées par la loi.

Or depuis plusieurs mois, les Gabonais sont témoins de la mise en service de camions et d'autres infrastructures physiques, financés par le contribuable, arborant le logo du CTRI.

Un camion arborant le logo du CTRI dans la ville d'Oyem (G9).

Cette appropriation des biens publics par une entité non reconnue constitue, au sens de la loi, un acte de détournement, et donc un crime. Il s'agit d'une atteinte grave à la légalité et à la transparence qui devraient prévaloir dans la gestion des ressources publiques.

Une junte hors-la-loi

Notre argumentaire souligne l'illégalité flagrante du CTRI et, par extension, la nature hors-la-loi de la junte qui se cache derrière cette entité. Sous la direction du général de brigade Brice Clotaire Oligui Nguema, le Gabon est gouverné par une structure qui ne respecte ni les lois du pays ni les principes de bonne gouvernance.

Un peu comme durant le régime déchu d'Ali Bongo, ou la nébuleuse Delta Synergie faisait la pluie et le beau temps en toutes circonstances. D'ailleurs, les Gabonais attendent toujours les resultats de l'audit commanditée par le chantre de la « libération », le « Josué de Ngouoni ».

Il est plus que temps que cette situation cesse, pour que le Gabon puisse enfin revenir à un cadre légal et constitutionnel légitime. Le peuple gabonais mérite d'être dirigé par des institutions reconnues et respectueuses de la loi, et non par des entités illégitimes qui nous replongent dans des pratiques mafieuses.